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un peu de tout, un peu de moi
27 octobre 2018

Edmund L. Gettier, la croyance vraie et justifiée est-elle de la connaissance ?

----- Un professeur connu pour un article de 3 pages -----

Edmund L. Gettier (né en 1927 à Baltimore, Maryland) est un philosophe américain et professeur émérite à l'université du Massachusetts à Amherst ; il doit sa réputation à un article de trois pages publié en 1963 intitulé Is Justified True Belief Knowledge?

----- L’analyse classique de la connaissance -----

Selon le modèle classique de la théorie de la Connaissance, que nous pouvons faire remonter à Platon, notamment dans le dialogue intitulé Théétète, une connaissance est une croyance vraie justifiée.

  • Croyance: Pour que je puisse prétendre connaître quelque chose, il faut que je sache que la chose ou que le phénomène existe et que j’y crois. Il faut que je crois que la terre est ronde;

  • Vrai: il faut qu’effectivement la terre soit ronde (a priori les dernières connaissances astronomiques le confirme…)

  • Justifié: il faut que je puisse expliquer cela, que ce ne soit pas juste un ouï dire auquel je crois bien gentillement ou que j’y crois parce que je crois au Grand Bousier (un joli petit insecte africain qui pousse des jolies boules de bouse dans lequel il pondra ses oeufs) qui a roulé sa boule (la terre) jusqu’à ce qu’elle devienne ronde. Il faut que je puisse faire appel à d’autres connaissance ou expérience directe ou indirecte pour justifier ma connaissance (ma baser sur une autre premisse vraie et déjà justifiée).

 De manière plus formalisée, l’analyse classique de la connaissance dit que:

Je (S) peux connaître quelque chose (p) si et seulement si

  1. p est vrai

  2. S crois que p est vrai

  3. La croyance par S que p est vrai est justifiée

 

----- Le problème de Gettier -----

Il existe cependant des situations dans lesquelles une croyance peut être à la fois vraie et justifiée, et ne constitue pas pour autant une connaissance. Plus exactement, la thèse de Gettier consiste à dire que l'analyse traditionnelle énonce les conditions nécessaires de la connaissance, mais que ces conditions ne sont pas suffisantes.

Gettier n’est pas le premier à mettre en cause le modèle classique. Le grand logicien Bertrand Russell, notamment avait déjà soulevé le cas suivant:

Alice (oui, la petite fille au lapin, celle de Lewis Carroll) voit une horloge qui indique 2 heures. Elle croit donc qu’il est bien deux heures (S crois que p est vrai). Il est effectivement 2 heures (p est vrai) mais ce qu’Alice ne sait pas c’est que l’horloge est bloquée depuis hier à 2 heures… Et donc c’est une connaissance accidentelle donc pas totalement justifiée (elle le serait si Alice analysait en plus la position du soleil, le mécanisme de l’horloge, etc.). Peut-on dire que Alice sait (connaît) vraiment l’heure qu’il est ?

L'attaque de Gettier porte sur l’aspect suffisant des 3 conditions: si les 3 conditions sont remplies, on n’a pas forcément une connaissance.

En d'autres termes, il est possible d'avoir de bonnes raisons de croire dans la vérité de p et que p soit fausse. D’autre part, si S a de bonnes raisons de croire que p est vrai et que p implique q, et si S déduit q de p et accepte q comme un résultat, alors S est justifié à croire que q est vrai. À partir de ces prémisses, Gettier construit deux contre-exemples qui montrent l'insuffisance de la définition traditionnelle.

Exemple 1: les candidats à l’emploi.

Smith et Jones se portent candidats pour le même poste. Smith a d'excellentes raisons de croire que la candidature de Jones sera retenue (il a lu le CV de Jones qui lui semble meilleur que le sien), et il sait par ailleurs que Jones a dix pièces de monnaie dans sa poche car il l’a vu joué avec sa monnaie près de la machine à café en attendant l’entretien. Soit p : « Jones sera embauché et il a dix pièces dans sa poche ». On voit que deux des trois conditions traditionnelles sont déjà remplies : Smith croit que p est vrai, et il est justifié à croire que p est vrai. Considérons maintenant la proposition q : « Celui qui sera embauché a dix pièces dans sa poche ». Il est clair que p implique q ; si on suppose que Smith déduit q de p, alors (par la seconde prémisse) Smith croit que q est vrai et cette croyance est justifiée.

Maintenant, il se trouve que, contrairement à la prédiction de Smith, c'est Smith, et non Jones, qui obtient le poste. Bien qu'elle soit justifiée, p est donc fausse (cas admis par la première prémisse). Mais il se trouve que Smith, à son insu (il ne fouille pas régulièrement ses propres poches), a dix pièces de monnaie dans sa poche ; q est donc vraie. Au total, Smith croit que q est vrai, il est justifié à croire que q est vrai (par inférence à partir de p), et q, à l'insu de Smith, est vraie. Nous sommes donc dans un cas de croyance vraie justifiée qui n'est pas pour autant un cas de connaissance : Smith ne sait pas que q est vraie.

Exemple 2: la voiture Ford d’un de mes collègues.

J’ai vu un collègue (A) rouler dans une Ford donc je peux supposer qu’il possède une Ford. Donc quelqu’un dans mon bureau possède une Ford. A n’a pas de Ford (c’était une voiture de location) mais un autres collègue B en a une (dont il ne parle jamais). Ma croyance est vraie et justifiée mais n’est pas une connaissance: je ne sais pas que quelqu’un dans mon bureau a une Ford.

----- Et après ? ------

L’article de Gettier s’arrête là, au constat des limites des conditions traditionnelles de la connaissance. Un peu court, cher monsieur…

Mais bon, plusieurs collègues philosophes vont reprendre le flambeau soit pour proposer d’autres exemples (des masses) soit pour modifier les conditions ou ajouter des conditions. nous y reviendrons.

----- Un texte ------

Le texte de gettier en anglais

 

 

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